Entretien avec Leslie Orsatti, dessinatrice des 'Gribouillis de Leslie' // LISAA Alumni
Leslie Orsatti a fait sa prépa à LISAA en 2007/2008 et est illustratrice sous le nom “Les Gribouillis de Leslie”. Elle nous retrace sa scolarité et le chemin parcouru depuis.
LISAA : Comment s’est passée ta scolarité à LISAA ?
Leslie : En septembre 2007, me voilà devenue une élève attentive en prépa avec des notations en dessin qui ne vont pas au-delà de 5/20… Aucune amélioration un mois après ! Je prends rdv avec la direction pour avouer mes craintes en prétextant m’être trompée de filière mais la direction insiste sur le fait que je dois persévérer et dessiner ce que je vois, tous les jours.
J’habitais la rue de Beaune dans le 7e. Cette rue des antiquaires me fascinait au point de photographier leur vitrine que je redessinais dans mon minuscule studio. Tellement minuscule que mes grandes feuilles de dessin ne trouvent d’espace qu’étalées à même le sol. C’est ainsi que j’ai appris à dessiner par terre et suis devenue incapable de dessiner sur un bureau. ENFIN !!! Mes efforts payent, mes notes atteignent la moyenne.
On touche à tout à LISAA : scénographie, histoire de l’art, infographie, nu, design de mobilier, architecture… Ma préférence va aux cours de design de mobilier. Lors d’un projet imposé, j’ai réalisé un rideau qui jouait de la lumière… Il m’a valu un 20/20, une première en prépa d’après la prof. Quelle joie ! Mais pour des raisons personnelles et à mon grand regret, je n'ai pas pu continuer mes études.
Peux-tu nous retracer ton parcours depuis ta sortie de LISAA ?
J'ai dû intégrer le monde du travail et j'ai alors abandonné l'univers créatif que je m'étais forgé à l’école. Puis 3 ou 4 ans après, une amie aménageait son appartement et voulait la commode autruche de Benoit Convers mais reculait devant le prix. Pour lui faire plaisir, je lui dessine une tête d’autruche… et ça marche ! Je n’avais pas trop perdu mon coup de crayon. À partir de là, le bouche à oreille fonctionne… beaucoup de nos proches veulent l’autruche et une grosse série s’ensuit.
Mes autruches habillent leur mur… et inconsciemment, mon émotivité (toujours présente) me rapproche de leur personnalité : incapable de voler, frustrée, agressive, etc. Au point que dans mes dessins, je leur donne des attitudes ou des prénoms d’humains. Ça marche bien ! Elles font même le salon "on se tutoie" sur Paris dans l’Atelier Basfroi.
Comment est née ta marque “Les gribouillis de Leslie” ?
Les autruches sont nées à une époque où comme elles, je ne pouvais pas voler, puis naturellement, le jour où j'ai enfin pu prendre mon envol, toutes sortes d'animaux sont nées.
Je dessine de façon spontanée, pas réfléchie, dans une insouciante naïveté. Je cherche juste à faire sourire parce que le sourire est le plus bel habit d’un visage et que je l'avais perdu à une époque. Je peux réagir en fonction d’expressions (cf. tryptiques "expressions américaines" ou "les taches" pour l’expression nulle "t’as une tache pistache" !), d’une tenue (tryptique “la laine, une affaire de bêtes”) ou encore d’expressions, de mots, d’une pensée, d’une colère. Les gribouillis, ça sonne la spontanéité. J'ai l'âme d'une artiste mais sans ego démesuré donc les gribouillis, ça me correspondait bien !
Qu’est-ce qui t’inspire pour tes créations ?
J'aime dessiner des portraits animaliers décalés qui reflètent souvent nos propres personnalités, nos humeurs, nos goûts…
Cette approche de l'illustration m'a amenée à créer un trait d'union entre le dessin et notre vie de tous les jours en la photographiant. Mes yeux sont attirés par le moindre nuage, objet, mur, arbre et me permettent tout de suite de créer une liaison : des petites choses simples prennent tout à coup un sens si évident ! Ces simples créations photographiques proviennent de mon téléphone portable et directement gribouillées au doigt... pas du tout facile lorsque l'on n'a pas des doigts de pianiste, croyez-moi !
Mon regard sur le monde est fait de poésie, sensible aux formes, aux objets, aux couleurs, au quotidien. J'essaye de déceler la beauté là où personne n'y prête attention.
Quels sont tes projets actuels ?
Je travaille au conseil départemental d'Ajaccio et je dessine dès que je termine mes journées. Mes projets en cours me surprennent de plus en plus, toujours grâce aux réseaux sociaux, mais ils doivent rester secrets pour l'instant.
Stefana Ricco (la galerie Marie Ricco de Calvi qui m’exposera tout l’été) a eu vent de mes créations, notamment par Paul Franceschi, architecte ajaccien que je ne connais qu’au travers d’Instagram. Je me retrouve donc sur son site PUESIA au milieu de vrais créateurs, d’autres artistes. À aucun moment, j’ai pensé pouvoir attirer une galerie ou un site dédié à l’art ou même encore être l'invitée de l'émission de France 3 ViaStella “6 et demi” présentée par Philippe Martinetti !
De quoi es-tu la plus fière ?
C'est dur comme question ! Je suis fière que mes gribouillis prennent autant d'ampleur et je suis fière de donner envie aux gens de prendre le temps de regarder autour d'eux. Je reçois beaucoup de photos de rocher ou de nuage de la part personnes qui me suivent sur les réseaux sociaux et qui peut-être ne prêtaient pas attention à tout ça avant. Elles ont confiance en mon œil affûté et ça me touche profondément.